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Maxime Berthou
Biographie
Maxime Berthou, Français né en 1981, sort diplômé de l’école supérieure d’art d’Aix-en-Provence avant d’intégrer le post-diplôme du Fresnoy Studio National des Arts contemporain de Tourcoing puis de suivre une formation pré-doctorale aux Arts Décoratifs de Paris.
Sa pratique artistique consiste à réaliser des essais cinématographiques à partir de l’expérience vécue lors de gestes performatifs. Son travail s’inscrit dans un contexte de recherche basé sur la pratique superposant un cadre artistique à un cadre scientifique.
Mark Požlep
Biographie
Mark Požlep est né en 1981 à Celje, en Slovénie. En 2006, il obtient son bachelor à l’Académie des Beaux-Arts et du Design de Ljubljana où il obtient également un master en Vidéo en 2009. Požlep a ensuite poursuivi son master avancé à l’École Sint-Lukas de Bruxelles où il a fait des recherches sur le transmédia. En 2019, il est diplômé de HISK – l’Institut Supérieur des Beaux-Arts – à Gand, en Belgique, où il vit et travaille actuellement.
Požlep travaille dans le domaine des arts visuels, de la performance, des installations spatiales et de la vidéo. Sa pratique artistique implique souvent de grands voyages, qui fonctionnent à la fois comme un art de la performance et de l’endurance ; ils sont des œuvres d’art en soi. C’est une exploration procédurale intense, visant à révéler la tension entre le politique et le poétique, l’action individuelle et l’impuissance personnelle. Le voyage n’est ni une illustration ni une métaphore, c’est une expérience, c’est la traversée de lieux réels.

Požlep est un conteur qui s’inspire de la culture populaire et de l’actualité pour interpréter des histoires sur des personnalités historiques, des protagonistes littéraires, des personnages de films et des personnages de divers groupes sociaux. Il est parfaitement conscient de la nature sensible des matériaux qu’il utilise pour des histoires qu’il interprète sans effort à l’aide de divers médias et modes de présentation. Il accorde une importance primordiale à l’image par rapport à la vidéo, à la performance par rapport au jeu et aux expositions de galeries classiques par rapport à la mise en scène de théâtre. Il nous emmène dans un monde composé de matériaux documentaires, d’expériences vécues, de mots parlés aussi bien que vers l’inconscient et l’insaisissable, sans pour autant créer une atmosphère de mystère. Požlep transforme sa réalité personnelle en réalité pour chacun de nous avec une incroyable lucidité. Il nous propulse dans un royaume où ses histoires rendent la réalité plus supportable; un royaume dans lequel le désir enfantin et l’enthousiasme fusionnent et se transforment en anecdotes pleines de fougue et d’exploits inoubliables. C’est un aventurier, un explorateur infatigable et un idéaliste incorrigible. Il est ludique mais tout à fait sérieux, précis mais imprévisible et maladroit. Alors que Požlep continue de revenir à la toile et au pinceau, ses fidèles alliés, son esprit refuse de se cantonner à l’espace sûr de son atelier. En tant qu’excellent navigateur en mer et dans le monde contemporain qu’il traverse, il attire l’attention sur les questions de pouvoir, sur les groupes ethniques minoritaires et sur les cultures invisibilisées.
Sa production, allant de la peinture, à la vidéo, en passant par la performance et l’installation, a été exposée lors des 5éme et 7éme Triennale d’art contemporain slovène, au Musée ESSL de Vienne et dans de nombreuses expositions individuelles et collectives à travers l’Europe.
Southwind
2017-2019
Mark Požlep a rencontré Maxime Berthou en Slovénie. Cette riche amitié a débouché sur quatre ans de collaboration en duo puis sur une résidence d’art d’une dizaine d’années entre la Slovénie et la France, animée par l’organisation Otto Prod. Le partenariat entre les deux artistes prend souvent la forme de performances de long-terme articulant observation et expérience, une forme de jeu de rôle dans un environnement social choisi. Ils considèrent que la personnalité d’une pièce est aussi importante que l’événement ou le sujet réel de la pièce. À travers des expériences et des émotions personnelles, ils utilisent la narration contemporaine comme un moyen de partager leurs connaissances et leurs prises de conscience.
En 2018, ils ont développé un projet culturel transmédia sous la forme d’un voyage de recherche le long du fleuve Mississippi, choisi pour sa symbolique comme «corps de la nation» mais aussi pour son histoire coloniale. Il s’agit de la voie navigable commerciale la plus importante du pays, s’étendant sur 3730 kilomètres et traversant dix états différents (Minnesota, Louisiane, Wisconsin, Illinois, Kentucky, Tennessee, Mississippi, Iowa, Missouri et Arkansas).
Leur objectif était de distiller le fameux whisky de maïs pirate connu sous le nom de Moonshine, une liqueur qui n’a été légalisée qu’en 2012 aux États-Unis après son interdiction pendant la prohibition. En 2019, les deux aventuriers se sont lancés un nouveau défi nommé Southwind. En voyageant sur les traces de Mark Twain le long de la route à la Nouvelle-Orléans à bord d’un bateau à vapeur traditionnel remis à neuf, ils ont récolté 42 variétés de maïs auprès d’agriculteurs locaux.

Le voyage a commencé le 2 septembre, un mois à peine après la fin d’une période de six mois d’inondations intenses, la plus longue et la plus étendue depuis 1993 selon les habitants. De nombreuses villes du haut Mississippi ont été emportées; les marinas dévastées et détruites et les infrastructures le long du fleuve abandonnées. Les habitants ont dû faire face à la misère accentuée par les inondations et la situation économique, ainsi qu’aux problèmes de santé dus à la pollution industrielle. Les inégalités raciales font par ailleurs partie de leur quotidien, notamment dans les petites villes et les endroits où les enfants sont moins scolarisés.
Mark Požlep et Maxime Berthou ont tourné des images de ces rencontres et documenté leurs connaissances et techniques dans une base de donnés, afin de partager ensuite leur parcours sous forme de films et de ciné-concerts. Selon Berthou, leur voyage a été rythmé par des rencontres inoubliables (comme Cowboy Jim) et des musiques légendaires: jazz, blues, rock ’n’ roll, country, cajun et Prince. En tendant la main aux autres, allant de village en village, les aventuriers ont collecté des données brutes sur l’histoire de la colonisation, de l’esclavage et d’un racisme malheureusement encore très présent. Ils ont également découvert les problèmes liés à l’agriculture moderne aux États-Unis (situations de crise dans certains États) et les déserts numériques dans certaines régions où les informations sont difficilement accessibles. Southwind est un projet qui non seulement suit le flux naturel du temps, compose avec les éléments et propose une enquête sur l’expérience personnelle, la transcription, la disproportion et les mécanismes de production d’une telle entreprise artistique, mais fonctionne également comme une recherche et une expérience de la société américaine contemporaine le long du fleuve mythique.

En ce qui concerne l’économie circulaire et la réduction des déchets, une fois que les marins sont arrivés à la Nouvelle-Orléans après leur voyage de 50 jours, ils ont converti leur bateau, avec l’aide d’un chaudronnier local qu’ils ont embauché en cours de la route, en une petite distillerie qui pouvait produire du Moonshine. Il leur a fallu 15 jours pour distiller les deux tonnes de maïs récolté, pour environ 2 000 bouteilles.
Plus qu’un simple whisky, le Moonshine de Berthou et Požlep ne se contente pas de porter les saveurs légendaires du Mississippi : c’est «le génie en bouteille» selon Berthou. Plus qu’un simple alcool en bouteille, c’est l’alchimie réussie d’une expérience humaine hors du commun.
Un projet aussi ambitieux ne laisse aucune place à l’improvisation: deux ans de planification et un accompagnement intégralement financé avant le départ – en échange d’un film documentaire complet, plusieurs expositions avec des partenaires, et la prévente de bouteilles aux distributeurs français et américains de spiritueux. Leur projet transmédia a été récemment présenté au Centre Pompidou et à l’American Center for Art & Culture à Paris, conquérant les amateurs d’alcool.