« L’expérience de cette résidence Boarding Pass à Takasaki (en août 2016) pour l’installation sonore Variance IV dans la statue du Kannon a été pour moi l’occasion de réaliser une volonté de proposer une oeuvre artistique dans un cadre qui n’y soit pas dédié.
Takasaki est implantée dans une région (préfecture de Gunma) où la proposition d’expression artistique contemporaine aux publics est peu importante.
La mise en place d’un travail de production d’une oeuvre sonore en immersion dans ce territoire, la relation établie avec les différents partenaires du Palais des Paris m’a permis de reconsidérer chacun des éléments et paramètres de l’installation en fonction de ce que je considère être leurs principaux enjeux : l’adaptation, la proposition et le rebond.
Le cadre de réalisation, une statue religieuse géante (Kannon) située sur le site du Jigenin Temple, accueillait pour la première fois une oeuvre d’art en son sein et ce à l’occasion d’un évènement traditionnel, la Matsuri Mandoe.
Rien dans ce contexte n’appelle la présence d’une oeuvre d’art sonore, il s’est pourtant avéré tout à fait propice à la présence et à l’épanouissement du dispositif de Variance IV.
Tout d’abord l’architecture de la statue, ses matériaux de construction -principalement en béton, offrent un potentiel de résonance sonore exceptionnel.
L’emplacement de la statue, au sommet d’une colline marque la limite entre espace urbain et naturel dont l’environnement sonore s’exprime avec une puissance surprenante. La présence notamment des cigales (higurashi) remplit l’espace sonore d’un enchevêtrement d’occurrences rythmiques dont le timbre se rapproche de sons électroniques et qui n’est pas sans rappeler les oscillations sonores produites par Variance IV, renforçant la sensation d’organicité générée par l’installation.
La place dans les liens sociaux locaux qu’occupe le site du Jigenin Temple et le Kannon, autour duquel se retrouvent regroupés des enjeux autant spirituels, qu’économiques et historiques, a été une occasion pour moi de mieux saisir les enjeux de la constitution du tissu social japonais.
Le travail a donc pour moi consisté à investir ce cadre avec le dispositif de Variance IV et à en observer l’intégration auprès d’un public soit tout à fait novice soit fidélisé aux propositions faites par le Palais des Paris à Takasaki depuis deux ans, mais aussi auprès de ses partenaires culturels, techniques ou financiers.
Les moments de partage autour de la production sonore de Variance IV ou et de son fonctionnement m’ont confirmé l’appétit des japonais pour l’expérience physique du son et les relations qui se nouent entre l’œuvre d’art et la nature.
Il m’a permis de recentrer le propos de ce dispositif: celui de proposer une expérience physique dans un cadre architectural, social, territorial singulier en accompagnant le phénomène sonore dans le sens de son déploiement naturel. »